Le superviseur musical : trait d’union entre le réalisateur et le compositeur

Le superviseur musical incarne le lien entre la musique et le cinéma. Véritable trait d'union entre le son et l'image, il sculpte l'expérience sensorielle du spectateur pour élever le film à une dimension émotionnelle supérieure. Au cœur de l'industrie cinématographique, il déploie une expertise précieuse, collaborant étroitement avec les réalisateurs, producteurs, showrunners, pour tisser une trame sonore pertinente. Côté industrie musicale, il travaille par exemple avec des compositeurs, des librairies musicales ou encore des labels, nous y reviendrons. Son travail va d’ailleurs bien au-delà de la simple sélection de morceaux ; il cherche à élever le récit visuel en le mariant à des compositions musicales qui servent le propos du réalisateur dans une scène. 

Le choix musical peut alors servir à :

• renforcer l’émotion présente dans une scène. Les compositions de John Williams sot très parlantes en ce sens.
• à apporter un propos complémentaire ou supplémentaire : « Stuck in the middle with you » est tout à fait a propos dans la scène de torture de Reservoir Dogs. De même pour « Running Up That Hill » dans une épisode de Stranger Things ou le personnage est face à un défi. 
• ou encore simplement accompagner la scène pour soutenir l’image de manière plus discrète 

Évolution du Métier et Impact du Streaming

L'avènement des plateformes de streaming a révolutionné la façon dont nous consommons le divertissement. Cette révolution a entraîné une demande sans précédent de contenu audiovisuel, plaçant le superviseur musical au cœur de l'action. Son rôle s'est étendu pour inclure la recherche constante de nouveaux sons et de nouvelles musiques, tout en jonglant avec les aspects pratiques liés aux droits d'auteur et aux licences, dans un écosystème en mutation constante.

Dans une interview avec Pascal Mayer, superviseur musical chez Noodles et intervenant à l’EMIC, il souligne l'importance cruciale d'adapter ses compétences aux évolutions de l'industrie. Il met en avant la nécessité de rester à l'affût des tendances musicales émergentes et des avancées technologiques. Le superviseur musical d'aujourd'hui doit être un véritable caméléon, capable de naviguer habilement à travers les exigences complexes du monde numérique tout en conservant une vision artistique cohérente.

Synchronisation, librairie musicale et oeuvres originales

Le superviseur musical déploie une palette variée de compétences pour répondre aux besoins diversifiés de l'industrie. En outre, selon le projet travaillé, son budget et les besoins artistiques qui lui sont liés, le superviseur musical peut essentiellement avoir recours à trois types de matière musicale :

1. Synchronisation à l'Image : la synchronisation à l’image consiste en l’utilisation d’une oeuvre musicale préexistante. Le synchroniseur musical a alors pour rôle non seulement de déterminer le titre qui sera le plus pertinent artistiquement mais également en fonction du budget disponible. Car la synchronisation a un prix, à négocier avec les ayants-droit du titre et leurs gestionnaires de catalogue. 
2. Création de Musique Originale : Parfois, le projet exige une composition musicale entièrement originale. Dans ce cas, le superviseur musical collabore étroitement avec des compositeurs pour créer des morceaux sur mesure qui s'harmonisent parfaitement avec l'esthétique du film.
3. Recours à la Librairie Musicale : Pour certains projets, le superviseur musical fait appel à des bibliothèques de musique préexistante, sélectionnant des morceaux qui correspondent à l'ambiance recherchée. Cela peut offrir une solution efficace pour les contraintes de temps et de budget.

Découvrez le portrait de Sarah, diplômée EMIC et TV Sales et Music Supervisor chez BMG Production Music France.

Le rôle artistique mais aussi juridique du superviseur musical 

Pour avoir le droit d’utiliser ces oeuvres, quelle que soit la méthode utilisée, le superviseur musical a également le rôle de « clearer les droits » des oeuvres utilisées. Lorsqu’il s’agit d’une oeuvre originale ou d’une oeuvre de librairie, le contrat entre l’artiste ou la librairie et la production audiovisuelle se fait selon la négociation entre les deux parties. Dans le cas de la synchronisation, le superviseur musical aura d’abord pour mission de retrouver les ayants-droit de l’oeuvre à utiliser, puis à négocier leur accord pour l’utilisation de leur oeuvre. Dans tous les cas, la négociation et la rémunération pour la durée de musique utilisée porteront essentiellement sur trois critères : la de diffusion de l’oeuvre audiovisuelle, les canaux et formats de diffusion (TV, web, cinéma, VOD etc.) et les territoires concernés. 

Ce métier, aux croisement de deux industries et mêlant artistique et juridique, possède donc de nombreuses spécificités qui sont enseignées aux étudiants EMIC, passionnés d’Audiovisuel et de Musique .

Un impact au delà du récit visuel

Avec l'avènement des plateformes de streaming, le rôle du superviseur musical s'intensifie, exigeant à la fois adaptabilité et créativité.

Des séries comme Stranger Things ou Sex Education ont prouvé que la bande originale d’une oeuvre audiovisuelle peut largement participer à son potentiel culte. En France, le titre « Murder On The Dancefloor » de Sophie Ellis Bextor paru à l’origine en 2001, connait un regain d’intérêt depuis sa synchronisation dans le film « Saltburn », sorti sur Prime Video le 22/12/2023, rentant en 13^e position avec 24,3 millions d’écoutes.

Les superviseurs musicaux ont donc un rôle crucial dans le récit mais également dans le positionnement de l’oeuvre sur le très vaste et dense marché audiovisuel aujourd’hui.